Carnets de Bretagne (1)
Les Côtes d'Armor
Une première particularité du département est son nom officialisé en 1990 alors que le premier avis favorable à un nouveau baptême date de 1962. C’est un peu le défaut de la girafe administrative où le cerveau est trop éloigné des pattes arrière. Enfin bref, nous sommes dans les côtes d’Armor longtemps appelées Côtes du Nord. Côtes d’Armor autrement dit côtes du pays de la mer. Saint-Brieuc, la préfecture, et une des plus grandes baies de France après celle du Mont Saint-Michel et les sous-préfectures de Dinan, Guingamp et Lannion. Autre particularité du département, sa culture parlée avec ses deux langues traditionnelles qui se partagent le territoire. Le gallo étant plus répandu à l’est du département et le breton à l’ouest. Je pourrais baragouiner quelques mots en breton pour ouvrir ce numéro mais comme je redoute d’être ridicule je vais m’en abstenir. Quoique. En parlant de baragouin, j’utilise déjà la langue bretonne puisque ce terme vient de bara, pain, et gwin, vin, dont la réunion proviendrait d’un lointain moyen-age et correspondrait aux mots employés par les pèlerins bretons qui demandaient l’hospitalité dans les auberges. Le plus amusant dans l’affaire est que le baragouin a entre autres comme synonyme le charabia. Or le charabia désignait au 19ème siècle l’émigrant auvergnat. Je ne vais pas m’étendre en baratin mais on remarque que l’étranger, le pèlerin nomade, le déplacé émigrant sont tous traditionnellement associés à un langage douteux et peu compréhensible. C’est l’avantage de la langue de laisser transpirer certaines attitudes et ici en l’occurrence un évident ostracisme à l’égard de l’autre et de l’étranger.
Le relief économique des Cotes d’Armor se dessine par l’agriculture, l’industrie agroalimentaire, l’élevage, la pêche évidemment et les nouvelles technologies dont celle des télécommunications, secteur presque entré dans la tradition comme le prouve le musée de Pleumeur Bodou. Les Côtes d’Armor et les ports, port et porc. En effet depuis plus de 30 ans le prix du porc se décide au marché de Plérin pour toute la France avec des conséquences européennes et même mondiales comme le disent les internautes de Wikipédia que j’imagine fiers d’êtres bretons.
Par où tu pêches?
La Bretagne un des fiefs de la pêche en France puisque près de la moitié de l’activité nationale se concentre sur cette région. La filière pêche emploie environ 9000 marins auxquels doivent s’ajouter tous les emplois que procurent les secteurs connexes. Par exemple les quelques 180 mareyeurs bretons ( ils sont 400 en tout en France) représentent un peu plus de 2000 salariés en Bretagne qui traitent 120 000 tonnes de produits par an. Seulement aujourd’hui de nombreux problèmes se posent. Le marché n’est pas au beau fixe. Les navires de pêche maritime ont diminué de moitié sur les 20 dernières années et ce parc de bateaux prend de l’âge. Plus de la moitié des navires ont 20 ans ou plus. Le tonnage a chuté dans les différentes criées. Enfin les ressources marines ne sont pas inépuisables. La bande côtière subit en outre des pollutions multiples et des dégradations de certains habitats, ce qui explique le contrôle des zones de pêches et des expériences sont menées pour une pêche sélective dans le Golfe de gascogne afin d’adapter les techniques de pêches à la fragilité du système biologique marin. A titre d’exemple de réglementation, la pêche de la coquille saint-Jacques en baie de Saint-brieuc n’est autorisée que 25 heures par an.
Les Côtes d’Armor, indicatif 22. ça rime avec Saint-Brieuc. Avec "Piano Bleu" aussi. (Souvenir d’une belle soirée France Inter dans ce bar à musique). Saint-Brieuc encore et un appel de la mer, un besoin de mer selon le tire de l’essai d’un écrivain briochin célèbre, Hervé Hamon. Et puis enfin, c’est aussi à cet endroit, dans ce pays briochin, une offre culturelle importante et originale En effet six scènes du pays de Saint-Brieuc ont décidé depuis un bon moment de travailler en réseau afin de proposer des spectacles à moindre coût et en grand nombre. Les six nommés sont la Quai des Rêves à Lamballe, le Grand Pré à Langueux, la Salle Horizon à Plédran, l’Espace Victor Hugo à Ploufragan, Bleu Pluriel à Trégeux et le centre culturel de la Ville Robert à Pordic. Eloignées d’une quinzaine de minutes de route les unes des autres, ces six scènes offrent chaque année une centaine de spectacles et de créations. La dernière citée présente l’originalité de façonner son programme à partir du prénom de Robert. Ça passe par exemple par une fête littéraire (c’est prévu pour la saint Robert justement) et le personnage de Robert est devenu une sorte de guide propriétaire virtuel des lieux. Ce centre culturel de Pordic donne à voir des spectacles de danse, de chanson française ou de théâtre au cours de sa saison et il organise une biennale d’art contemporain au début de l’automne. La dernière ayant eut lieu en octobre 2010, il faudra patienter jusqu’en 2012 pour la suivante. Il n’empêche que les autres propositions sont toutes très originales et se dévoile sur le site de la ville en cliquant sur le centre culturel à www.pordic.fr
Outre les deux grands pôles de télécommunications spatiales et nouvelles technologies autour de Lannion avec le technopôle Anticipa et celui du zoopôle de Saint-Brieuc qui abrite 700 techniciens en recherche animale et analyse biologique, le département possède une plate-forme associative d’aide à la création d’entreprise, Armor Initiative. Ici les repreneurs ou créateurs d’entreprise avancent un projet qui est examiné puis obtient un agrément grâce à un comité composé de chefs d’entreprises, de banquiers et de partenaires. Lorsque l’accord définitif est obtenu, un contrat de prêt est rapidement mis en place et le bénéficiaire est suivi et parrainé pendant toute la durée de sa prise en charge. Les prêts d’honneur s’échelonnent de 6000 à 24000 euros et ont permis en 10 ans à près de 190 entreprises de voir le jour. Alain nous donne l’exemple dans son courrier de trois femmes artisans qui ont créé leur boutique atelier à Moncontour, bourg de 930 habitants (www.laboutique-atelier.com)
Photo: S.U. Le Télégramme.
L’association d’aide aux projets est à www.armorinitiative.asso.fr
Don't touch à ma culture
Il existe de nombreuses associations qui privilégient la valorisation du patrimoine breton qu’il soit culturel, social ou environnemental. Simon nous a envoyé une série de références qui sont toutes attachées les unes aux autres par ce souci d’entretenir une mémoire locale et de l’adapter à la modernité. Kendalch est la première référence en tant que confédération de valorisation des arts populaires bretons (notamment de la danse) qui regroupe 15000 membres. Simon précise que Kendalch a son siège régional dans le Morbihan et une antenne dans chaque département (il écrit les 5 départements bretons ainsi qu’en Ile de France). La Loire Atlantique est donc incluse dans ce réseau. [Sur le sujet de retour de ce département à la carte bretonne, nous avons encore reçus de nouveaux messages. C’est une histoire sans fin qui souvent dénonce le jacobinisme permanent refusant cette logique historique bretonne. Or je répète que nous suivons la géographie administrative telle qu’elle est dessinée actuellement. Ce n’est pas à nous, malgré toutes les raisons qui sont invoquées, aussi bonnes soient-elles, de redéfinir ces contours régionaux. Ceci n’excluant aucunement des partenariats entre le département de Loire atlantique et la région Bretagne qui existent déjà. Donc Kendalch possède de nombreuses antennes qui apparaissent à www.kendalch.com
Simon, toujours nous soumet le comité d’action culturelle sud 22 qui est un centre de ressources au profit du développement socioculturel du Centre Bretagne. Ce Cac est autant l’interlocuteur des associations que des collectivités soucieuses de leur avenir culturel. Parmi les services d’activités de ce centre, il y a l’audiovisuel, la diffusion culturelle, la lecture, le théâtre, la jeunesse et les services à la vie associative. Son lien est dans le portail associatif etrarie à http://etrarie.net/rubrique89.html
Une économie en supension....
Elle est jeune et dynamique. Plutôt séduisante et elle commence à faire parler d’elle. Il s’agit de l’entreprise « A un fil » sise à Trémargat. Ronan nous informe qu’elle a créé un concept qui se laisse appeler « Plum’arbres », nouveau mode couchage arboricole. Plus précisément la jeune et dynamique société a déposé un brevet et une marque sur le principe qu’elle exploite de suspension en un seul point. Déclinant différents types de couchages suspendus, l’entreprise s’est attaquée aussi aux tables et étagères en suspension. A la limite du poétique, le concept a d’abord très bucolique et économiquement viable et durable. La société fait appel à des entreprises de la région pour réaliser ses modèles. Propriétaire de sa marque cette jeune entreprise assume sa diffusion et se répand maintenant en Blgique, dans les Landes, Les Pyrenées. Bref elle ne manque pas d’air. www.a-un-fil.com
Pour boucler la boucle économique, du moins provisoirement, je retiens encore l’exemple d’Eclis. Cette scic dont le nom complet est « Eco Construction Locale et Initiatives Solidaires » fait la promotion de l’éco-habitat sur le pays de Dinan. Installée à Quévert cette société coopérative renseigne et informe tous les intéressés collectifs ou particuliers, fait de la formation et surtout suit les projets de construction en activant son réseau de contacts avec les professionnels de l’éco-construction. Eclis, par son caractère solidaire, veut élargir l’accès des publics à l’éco habitat et tente de solliciter prioritairement les fournisseurs de matériaux locaux. Ce type de structure n’est évidemment pas la première en France, mais depuis 2007 qu’elle existe, elle a pris une place dans le développement de nouveaux modes de vie dans les côtes d’Armor. Actuellement Eclis ouvre une nouvelle session de formation destinée aux demandeurs d’emploi en catégorie restauration du patrimoine. http://scic-eclis.org/
Des gens presque ordinaires...
Encore une découverte qui donne à lire et à voyager différemment. C’est Jean-Pierre qui nous a alerté de l’existence d’un journal pas comme les autres et donc comme je les aime. (Son siège est à Rennes, mais s'intéresse à toute la Bretagne). Il se trouve sur le Net et s’appelle histoires ordinaires, parce qu’il traite tout simplement des anonymes, inconnus qui étonnent et fascinent, parfois même nous font sourire tel ce rennais, fier d’être un contemporain de Johnny et collectionneur de vinyles. Son appartement en abrite 130 000 et notre collectionneur souhaiterait léguer ce patrimoine à un conservatoire. Ce monsieur s’appelle Robert Lacire (ça ne s’invente pas). Mais le journal ne tient pas de l’anecdote exclusivement puisqu’il relate l’histoire d’acteurs locaux à l’instar des invités des carnets dans le monde entier. Résolument conçu comme un journal, sa page d’accueil s’ouvre sur des reportages et témoignages. Actuellement le témoignage des bouleversements en Egypte vécus de l’intérieur. Histoires ordinaires, c’est une équipe de 8 journalistes réunis par un ancien grand reporter et qui ont choisi de dresser les portraits des citoyens du monde. Je pourrais reprendre l’argumentaire en l’adaptant à nos carnets tellement les points de vue se rapprochent : « « Partout vivent des gens ordinaires surprenants, à des degrés divers, d’énergie, de créativité, de solidarité, de convictions, de passion pour l’intérêt général, en un mot d’humanité. Ces personnes ou ces groupes, nous voulons les rencontrer, les faire parler de leurs initiatives, de leurs luttes, de leurs bonheurs et leur permettre de partager leurs actions ». Illustration avec Michel Brochet, agronome, accroché à sa terre haïtienne ou avec Simon ; animateur nature de la forêt de Brocéliande parti s’installer dans le Vermont pour satisfaire son rêve d’Amérique.