Télétravail et soho-solos
Télétravailleurs, unissez-vous. Peut-être, entendrons-nous un jour cette apostrophe révolutionnaire retentir dans nos campagnes. Je ne vous parle pas d'un nouvel élan patriotique, mais d'un comportement qui commence à modifier les activités professionnelles et personnelles. Le télétravail, sans devenir une nouvelle mode, s'apparente à un désir de vie différente avec ses avantages et ses défauts, ou plutôt ses risques. Les départements à forte imprégnation rurale sont tentés et jouent le jeu pour certains de l'aide à l'installation des solistes du travail qui profitent de l'ère numérique pour changer d'air. L'exemple publié dans l'article ci-dessous extrait de la compilation des initiatives de "Ceux qui font bouger la France" est très frappant de cet appel d'offres lancé par certaines chambres de commerce et d'industrie. Logiquement, sur le papier, tout le monde peut y gagner une nouvelle donne, les communes en attente de repeuplement, les usagers dans l'aspiration à une vie mieux gérée et moins stressée. Seulement on ne s'improvise pas télétravailleur du jour au lendemain. Le journal Libération dans son édition du 23 novembre consacre un dossier au territoire du Cantal. Comme le Gers, ce département se lance dans une politique volontariste en investissant 10 millions d'euros afin d'installer l'ADSL aux quatre coins de son espace. Même s'il est trop tôt pour tirer un bénéfice de cet engagement, les premières rencontres du télétravail organisées à Murat début novembre ont rassemblé une petite population de graphistes, journalistes, informaticiens et autres techniciens adeptes du Net. Il ressort de cette grande concertation des avantages de vie non négligeables, par exemple dans la gestion familiale et dans l'organisation de l'emploi du temps de travail. Le risque est de se retrouver seul face à soi-même, un comble pour un "soho-solo", mais la peur du vide freine l'enthousiasme que procure la liberté. Afin de favoriser les échanges d'expériences et de permettre une mutualisation des compétences, le Cantal a créé sept télécentres où les télétravailleurs peuvent se rencontrer et mieux se mobiliser sur leurs projets professionnels. La contrepartie demeure pour l'instant la rémunération. Les revenus sont souvent inférieurs à ceux générés par la précédente activité. Il existe néanmoins une contrepartie à cette contrepartie, pardon pour la redondance, avec un coût de la vie lui-aussi minoré. L'immobilier, les frais de déplacement et le budget familial sont les principales poches qui connaissent des allègements conséquents. L'article mentionne encore le faible taux de télétravailleurs en exercice en France, 7% des salariés contre 13% en Europe. Le gouvernement est décidé apparemment à promouvoir cette activité avant d'en négocier les modalités devant le Sénat.
Une plate forme du télétravail s'est créée et je suppose qu'elle n'est pas la seule, mais en tout cas elle se veut didactique et nationale.
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Les Soho-solos du Gers
Franck Cazalas, chef de projet Soho Solo.
Le Gers est un département dépourvu d’industries et d’entreprises. Comme d’autres, sa rusticité saine et sa spécificité paysagère ne suffisent pas à développer une entière activité touristique. En revanche comme d’autres il possède pour les mêmes raisons un espace vital et un potentiel d’accueil remarquables. C’est pour cette raison qu’est né le 1eravril 97 le CEEI Gers Gascogne, autrement dit le Centre Européen d’Entreprise et d’Innovation à partir d’un projet de développement territorial lancé par l’Union Européenne treize ans plus tôt. Ce CEEI est le premier en France à être implanté sur un territoire à forte dominante rurale et il fait partie aujourd’hui d’un réseau européen, EBN, qui compte près de 160 CEEI. Le principe commun à tous ces centres est de faciliter la création d’entreprises ou d’activités innovantes sur un territoire donné. Le CEEI Gers Gascogne réunit différents partenaires, CCI, département ou communautés de communes. Son fonctionnement est assuré par plusieurs types de ressources financières comme les cotisations des membres, les prestations facturées aux collectivités et aux entreprises ou les contributions des entreprises hébergées en pépinière. La particularité de ce CEEI est d’avoir créé un espace Soho/Solo. Ce terme désigne les télétravailleurs qui dépendent uniquement d’un réseau informatique d’échange et de correspondance sans subir des impératifs de lieux de travail. « Au départ il s’agissait de renforcer l’économie gersoise en vantant les ressources locales à commencer par la qualité de vie. Même si ce n’est pas un argument économique central, nous nous sommes rendus compte que ce cadre de vie attirait dans le département une nouvelle catégorie d’actifs qui peuvent travailler depuis chez eux grâce à Internet. Ces soho-solos (soho est la contraction de small office, homme office) ou net entrepreneurs qui sont plus de 12 millions en Europe, Europe du nord principalement, cherchent à venir s’installer dans les régions du sud européen. Notre mission est donc de capter ces personnes et de les inciter à résider chez nous », annonce Jean-Michel Justumus, directeur du CEEI. Beaucoup de ces soho-solos cherchent à s’installer avec leur famille loin des agitations des grandes agglomérations. Les petites localités sont les plus prédisposées à accueillir ces nouveaux venus. Leur présence garantit la sauvegarde des services et des écoles de village et en échange le département leur assure de bonnes conditions de travail via le développement des réseaux de communication à haut débit dont les populations locales peuvent profiter à leur tour. Depuis la création de ce département ce sont déjà plus de 300 télétravailleurs qui ont pris racine dans le département. « Sur les 300 personnes répertoriées dans notre annuaire, les deux tiers sont françaises et les autres proviennent de Grande-Bretagne, d’Allemagne, des Pays-Bas ou de Belgique. Côté français, certains candidats viennent de la proximité, c’est-à-dire de Bordeaux ou de Toulouse. En revanche, Paris, le Grand Est et la Bretagne sont de grands pourvoyeurs de soho-solos. Ces implantations nécessitent non seulement un cadre de vie précis, mais aussi des services que nous leur fournissons avec un accompagnement professionnel et une mise en place de partenariats. Il faut évidemment que chaque commune rurale désireuse de prendre une place dans le dispositif, joue le jeu de cette dynamique ».Plus récemment une trentaine de villages ont adhéré directement au projet et ont constitué une offre d’accueil complète en recensant les logements vacants et les services de proximité. Les cas de figure des arrivants sont variés, mais néanmoins beaucoup se consacrent à la création et à la gestion de sites Web des PME. Illustration plus particulière avec Surzie, originaire d’Ecosse et installée avec son mari depuis cinq ans dans le département. A tout deux ils ont développé une activité de marketing d’entreprises et complètent leur emploi du temps en pratiquant la vente de cashmere d’Ecosse et en accueillant les visiteurs dans leur maison gîte.