un village qui renaît: Salives en Côte d'Or
Alain Houpert est un enfant de la campagne bourguignonne désertifiée et le fils de l’épicier d’un village gros comme une tête d’épingle sur la carte. L’adolescent poursuit ses études à Dijon soit à une quarantaine de kilomètres de distance avant de faire médecine comme le disent les parents fiers de savoir leur fils porter ultérieurement la blouse blanche qui témoigne de l’ascension sociale. Alain sera radiologue. Il l’est toujours, en cabinet d’associés dans la ville de ses études. Aujourd’hui il est maire de son village, Salives, 290 habitants alors que dix ans en arrière la population avait fondu au point d’atteindre péniblement 180 personnes. Entre les deux dates, Alain qui est resté attaché à sa terre natale, avait pris fait et cause pour un ancien donjon du XIème siècle qui menaçait ruine au cœur de la localité. En 1986, l’édifice se désarticule, perd la moitié de ses murs et se répand au sol dans une montagne de poussière. Etonnamment, il est seul à réagir. La municipalité de l’époque pense raser les vestiges qui tiennent encore debout pour en faire un parking. Le jeune médecin crée une association de sauvegarde et parvient à obtenir une somme de trois cent mille francs du Ministère de la Culture pour consolider les restes du donjon. Alain songe à une réhabilitation de ce patrimoine. Il passe deux ans à convaincre les habitants et prend le fauteuil de premier magistrat. C’est à nouveau le Ministère de la Culture qui lui accorde l’enveloppe nécessaire à la restauration. « L’effet de ce succès a permis à la population de prendre conscience que ne pas avoir d’argent en poche n’était pas une raison pour perdre tout espoir ». La deuxième étape consista à restaurer les remparts du village, soit un kilomètre et demi de vieilles pierres épaulées par un dizaine de tours. Les murs s’affaissent et leur restauration nécessite des fonds importants. Alain frappe à toutes les portes, département, région, Etat, Europe. Il conservera la même stratégie opiniâtre par la suite. Il obtient à nouveau gain de cause et la dernière phase de reconstruction est en cours. La population est définitivement convaincue et les visiteurs se multiplient. Au cours de ces années de restauration de l’enceinte, Alain Houpert mène d’autres opérations de restructuration à commencer par un groupe de granges qu’il reconditionne en centre culturel. Le théâtre au cœur du dispositif est une magnifique salle de 250 places parrainée par Hubert-Felix Thiéfaine qui reçoit 25 spectacles par an sans compter des journées scolaires et des séances proposées aux hôpitaux et maisons de retraite. Le centre est géré par un directeur, un régisseur et deux intermittents du spectacle. Un office de tourisme ouvre ses portes, des logements communaux rénovés sont mis en location. Les loyers couvrent les emprunts contractés et les premiers néo-ruraux investissent le village. Pendant ce temps, Alain, monsieur le Maire, poursuit sa tournée des soutiens publics. Pire il s’attaque aux services fiscaux de l’Etat qui n’ont jamais honoré les taxes locales depuis 50 ans qu’est implanté sur un terrain communal un établissement du CEA (Commissariat à l’Energie Atomique). Il remporte une nouvelle victoire contre le géant nucléaire. Le village récupère une petite partie des taxes, le reste allant au canton et au département. Aujourd’hui la vie se reconstruit et les projets prennent de l’essor. Salives compte huit employés communaux à temps plein et Alain rêve encore. Cette fois il s’agit d’un centre médical pour malades d’Alzheimer avec un potentiel d’accueil de 70 personnes. Plus récemment Alain Houpert a été élu sénateur et il assure que son nouveau mandat lui permettra de répandre les bonnes idées à sa circonscription.