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16 Jan

Les apiculteurs piqués au vif.

Publié par Philippe BERTRAND  - Catégories :  #environnement

Je ne m'y connais pas en matière d'apiculture. Pire je n'ai jamais aimé goûter le miel. Je sais que cet aveu n'est pas très professionnel. Et pourtant vous pouvez objecter au critique littéraire qui vous annonce une rentrée  de piètre qualité, qu'il n'a jamais lu les 700 titres de cette rentrée. Un bon Nothomb ne fait pas une bonne rentrée en sachant que, quoiqu'on  dise, notre chère Amélie fera toutes les unes. Donc le miel, les abeilles, les ruches, l'enfumoir, l'économie et les pesticides répandus sur les mono-cultures n'entrent pas dans mon rayon de soucis. Quoique. C'est une rencontre avec une personnalité qui a éveillé ma curiosité: Henri Clément, président de l'UNAF, Union Nationale des Apiculteurs de France. Henri, outre son caractère jovial et rapidement amical, est un digne représentant de cette population très hétéroclite des apiculteurs. Une formation d'historien pour ce producteur de miel reconverti après plusieurs années d'enseignement au même titre que ces amateurs ou professionnels, fonctionnaires, ouvriers voire intellectuels pris de passion pour l'insecte emblème de la biodiversité. Henri est donc à la tête de cette étonnante congrégation de domestiqueurs d'abeilles. Parce qu'il y a abeillle et abeille. Il faudrait tout conjuguer au pluriel. 25 000 sortes dans le monde et un bon millier en France. Pourtant une seule a droit aux précautions des professionnels: l'abeille domestique. Les aficionados vous diront qu'elle est à moitié domestique car si elle  sort de sa ruche pour se volatiliser vers des ailleurs, elle retourne à son statut d'insecte sauvage. De la même façon, les sauvageonnes qui s'agglutinent en un essaim accroché à votre toit ou à l'abribus de votre quartier, peuvent passer à la domestication sur la simple intervention de l'apiculteur qui les transfère dans une ruche. Mieux que domestiquer, l'apiculteur contrôle les abeilles. Il les guide sans jamais les maîtriser car l'insecte est réputé pour son entêtement et sa totale autonomie. Alors pourquoi un tel intérêt pour ce que je ne connais que très mal voire pas du tout? Parce qu'il y a le feu dans les ruchers. Les abeilles sont depuis la nuit des temps des grandes pourvoyeuses de biodiversité et  de propagation des plantes qu'elles butinent. 200 000 végétaux dits méllitophères sont assurés de leur renouvellement par l'action des butineuses hormis l'action du vent, de l'eau et de quelques oiseaux transporteurs de pollens. Un calcul savant et abstrait a été réalisé sur le chiffre d'affaire induit par le travail des insectes pollinisateurs sur une économie mondiale. En 2005, l'estimation portait sur 153 milliards d'euros! Henri Clément les a baptisées sentinelles de l'environnement et il est courant de faire de l'apiculteur lui-même un acteur de l'écologie au quotidien. Or l'urgence est de mise depuis plusieurs années et l'apiculture lance la charge de façon désormais récurrente contre les pratiques de l'agriculture intensive. Procès sur procès, l'apiculture compte les disparitions des abeilles. Dernier ennemi en vue, le Cruiser 350 utilisé dans la culture du maïs. La surmortalité inquiétante des insectes pollinisateurs pose d'abord le problème de la survie de cette petite économie: en 1995, les 85 000 apiculteurs de France produisaient 32 à 33 000 tonnes de miel par an et seuls 6 à 7000 tonnes étaient importées. Dix ans plus tard, ils ne sont plus que 70 000 pour une production de 20 000 tonnes de miel. L'importation a donc logiquement augmenté pour passer à 20 000 tonnes. Il faut savoir que seuls 2% de cette population de producteurs en font profession et exploitent 40% du parc des ruches. La surmortalité pose ensuite une autre question plus dramatique sur la pérennité de la biodiversité. Il faut savoir que des cultures fruitières ou maraîchères sont assurées avec  la complicité des abeilles. Le déplacement des ruches vers ces zones de culture procède d'une garantie de développement des espaces cultivables et explouitables. D'ailleurs la pratique amateur de l'apiculture revient au goût du jour au même titre que les pratiques eco-responsables qui se multiplient. Les deux se conjugent et les deux nous interpellent sur l'avenir de nos espaces de vie.
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Le complément de l'émission des Carnets de Campagne de France Inter avec son journal régulier des solutions.